L'Ecole de Paris est un terme qui désigne un fait historique et non un mouvement artistique cohérent.
Ce terme créé de toutes pièces en 1925 par le critique d'art, André Walnod a tout d'abord servi à désigner les très nombreux artistes, venus de tous les horizons, qui se retrouvèrent à Paris du début du 20ème siècle à la deuxième guerre mondiale et qui firent de Paris la Capitale du monde des Arts ouverte à toutes les tendances, à toutes les expériences artistiques et à toutes les recherches.
Contre les nationalismes et la xénophobie ambiante, ce terme désignait et reconnaissait ces innombrables artistes étrangers qui s'étaient regroupés autour des ateliers et des académies libres de Montparnasse, autour du carrefour Vavin et des cafés le Dôme, la Rotonde ou le Select et qui fréquentaient l'avant-garde des penseurs, des écrivains et des journalistes d'avant guerre.
Ils ont été plusieurs centaines. Certains d'entre eux sont devenus célèbres, d'autres sont restés dans l'ombre, certains ont été reconnus très tôt, d'autres ont dû attendre, d'autres enfin ont été balayés par les atrocités de la guerre avant d'avoir la chance de connaître quelque succès.
Parmi eux Amadeo Modigliani d'Italie, Picasso d'Espagne, Foujita du Japon, Chagall, Krémègne et Kikoïne de Russie, Pascin de Bulgarie, Soutine de Bielorussie ... à partir de 1910, des bataillons d'artistes, juifs ou non, chassés de leur pays par la révolution russe, l'antisémitisme ou, plus tard le fascisme ou attirés par ce bouillonnement créatif.
A côté des mouvements, de l'impressionnisme triomphant, du fauvisme, de l'expressionnisme, du cubisme, l'Ecole de Paris reste ouverte à tous les langages.
Chacun apporte son style, ses conceptions, sa sensibilité, son pessimisme, son amour de la vie, son humour.Chagall répond d'une pirouette lorsqu'on l'interroge sur son univers onirique. "C'est comme çà" avec un petit geste de la main. Krémègne explique. Chacun dit ce qu'il veut faire, ses prochaines expositions.
Tous les accents et toutes les langues raisonnent sous les plafonds du Dôme. Pricert se sent à l'aise dans cette atmosphère. Il parle italien avec les uns, russe avec d'autres, allemand avec d'autres encore. On parle français aussi.
Il n'y a pas de doctrine ni de chef de file. Chacun croit en ce qu'il fait. Chacun doute. On rit, on parle fort, on griffonne sur des bouts de papiers, on parle en confidence.
Pour ceux qui survivront à la guerre et aux drames, cette époque reste celle où tout était possible. Quelques soient leurs choix ultérieurs, quelque soit leur formation antérieure, c'est là qu'ils ont entrevu ou même goûté ce qui s'offrait à eux.